Qu’est-ce que le jeûne intermittent ?

Il y a de fortes chances que tu aies entendu parler du jeûne intermittent (JI) et de ses vertus incroyables, des personnes qui disent avoir beaucoup plus d’énergie et l’esprit clair depuis qu’elles sautent le petit-déjeuner, par exemple.

Le jeûne intermittent consiste à alterner des temps de prises alimentaires et des moments de jeûne sur un rythme donné. Il y a plusieurs façons de le pratiquer : réduire la fenêtre de prise de ses repas sur la journée (par ex la technique 16/8 qui consiste à répartir ses repas sur une fenêtre de 8h et jeûner pendant 16h) ou alterner les jours normaux et les jours de jeûne ou de réduction calorique. Plusieurs études démontrent des bienfaits possibles du jeûne intermittent, mais il y a un « mais » : la grande majorité des études qui démontrent des effets positifs ont été réalisées sur des hommes. Or, le fait d’avoir un cycle menstruel nous fait réagir de façon totalement différente.

Ce qu’il faut savoir c’est qu’un jeûne est un stress pour le corps. Or, nos hormones sont particulièrement sensibles aux effets du stress. S’il s’agissait juste de ce petit stress ponctuel, ce ne serait pas un problème, mais beaucoup d’entre nous sont déjà soumis.e.s à un stress chronique, une tendance aux carences du fait de la culture des régimes, une tendance à l’hypothyroïdie (qui touche plus les femmes que les hommes), etc, qui font que le JI sera une très mauvaise idée et aura des conséquences opposées à celles attendues.

Chez les personnes menstruées, le JI dans ses formes les plus classiques a tendance à augmenter le cortisol, hormone du stress, et la résistance à l’insuline. Ces changements peuvent à leur tour dérégler l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HSS), ce qui dérègle complètement l’équilibre hormonal. Le résultat sur le long terme : déséquilibres hormonaux, stress, fatigue, augmentation des risques de diabète, etc.

 

 

Des sensations parfois trompeuses

“Je me sens super bien depuis que je saute le petit-dej, j’ai plein d’énergie !” “Je n’ai pas faim le matin donc je ne mange pas de petit-dej” “Avant, j’avais faim une heure après mon petit-déjeuner, mais depuis que je ne mange plus le matin je tiens jusqu’à midi sans problème et je suis en forme”… Toutes ces phrases, je les ai entendues. Ces ressentis, ils sont assez courants.

En fait, comme je le disais, le JI est un stress pour le corps. Et que fait le stress ? Il nous rend réactif. Quand le cortisol est augmenté ou quand tu marches à l’adrénaline, tu ne vas pas ressentir la fatigue et les autres effets négatifs. Pas tout de suite, en tout cas.

Mais plus ou moins rapidement viennent les conséquences de cela : sommeil perturbé, cycles perturbés, augmentation du stress et de l’anxiété, troubles de l’humeur… Et sur le plus long terme, cela peut perturber la fonction thyroïdienne et le métabolisme et viennent alors : perte de cheveux, prise de poids abdominale, frilosité, etc.

De plus, avoir faim peu après le réveil est un signe de bonne santé. L’absence d’appétit le matin est rarement bon signe et rarement le fonctionnement physiologique d’une personne. Il signale la plupart du temps un dérèglement.

 

 

Les inconvénients du jeûne intermittent

Augmentation du cortisol

Comme vu plus haut, jeûner augmente le cortisol. Un des effets du cortisol est d’augmenter la glycémie (taux de sucre dans le sang). Or, des montées régulières de glycémie participent à augmenter la résistance à l’insuline, ce qui augmente les risques de diabète et troubles métaboliques.

Un cortisol élevé de manière chronique va aussi avoir tendance à réduire la masse musculaire, augmenter le stockage des graisses, augmenter les pulsions alimentaires, augmenter les problèmes inflammatoires (douleurs, problèmes de peau, etc), fragiliser l’immunité, altérer l’humeur, etc.

Tendance à l’hypothyroïdie

Attention, petit passage un peu complexe pour expliquer en gros le fonctionnement thyroïdien : Le cerveau synthétise une hormone appelée TSH, qui stimule la thyroïde. En réponse, celle-ci produit 2 hormones, 90% de T4, qui est inactive, et 10% de T3, qui est active. Puis après sa libération dans le sang et son entrée dans les cellules, l’essentiel de la T4 est normalement convertie en T3, forme active.

Enfin, il existe une autre hormone, la T3 « reverse », hormone anti-thyroïdienne. En temps normal, elle est produite en très petite quantité, mais dans certains cas, sa production est augmentée pour protéger l’organisme face à des chocs et stress physiques en ralentissant le métabolisme.

Lorsque le cortisol augmente, la thyroïde produit moins de T3, forme active des hormones thyroïdiennes. De plus, face à une fatigue ou un stress chronique, une grande partie de la T4 se convertit en RT3, afin de ralentir le métabolisme. Cela bloque les récepteurs des cellules et empêche la pénétration de la T3 dans les cellules. Avec tout cela, la thyroïde est ralentie, sans que ce soit forcément visible sur un bilan sanguin classique, qui ne mesure que la TSH.

Les conséquences ? Fatigue matinale, tendance à la prise de poids, extrémités qui gonflent, perte de cheveux, cycles rallongés, frilosité, etc.

Risque de carences

Normalement, le JI n’implique pas forcément de restriction calorique. Manger ses repas sur une fenêtre de temps plus courte ne veut pas nécessairement dire manger moins. Mais dans les faits, c’est une conséquence fréquente. Les personnes qui jeûnent vont le plus fréquemment sauter le petit-déjeuner, manger vite fait le midi et n’avoir qu’un seul vrai repas complet le soir. Or, la restriction calorique est elle-aussi un facteur de déséquilibres hormonaux et un stress pour le corps. Quand on ne couvre pas ses besoins, les cycles ont souvent tendance à se rallonger et les règles à être perturbées voire à disparaître. Une autre possibilité va être qu’il y ait encore des saignements plus ou moins réguliers mais avec des difficultés d’ovulation et donc les signes qui vont avec, syndrome prémenstruel & cie.

Ensuite, la restriction calorique n’est pas que quantitative elle est aussi qualitative. Entre autres, quand il y a trop peu de repas sur la journée, les apports en protéines sont rarement couverts. Or, les protéines sont essentielles à l’équilibre du cycle menstruel. Et prises au petit-déjeuner, elles sont un moyen facile d’améliorer la sensibilité à l’insuline, de stabiliser la glycémie et de participer à la réduction du stress et le bon fonctionnement de l’axe HSS cité plus haut.

Troubles de l’alimentation

Un autre problème possible du jeûne intermittent est le même que celui des régimes et de toutes formes de restriction : il peut augmenter une obsession de la nourriture, avec des cycles de restriction > excès d’alimentation. Il représente particulièrement un risque pour les personnes qui ont des antécédents de TCA. De plus, il peut avoir tendance à perturber l’hormone de la faim, ce qui conduit à une augmentation de l’appétit. Enfin, le fait de suivre un rythme imposé peut conduire à ignorer les signaux biologiques du corps, tels que la sensation de faim qui signale un besoin de se nourrir.

 

 

Contre-indications au jeûne intermittent

Dans le prochain paragraphe, nous allons voir dans quelles conditions le jeûne intermittent peut être pratiqué de manière plus bénéfique pour les personnes qui le souhaiteraient. Mais attention, dans certaines situations il est fortement déconseillé quelle que soit la manière de l’appliquer.

Il vaut mieux éviter totalement le JI dans ces cas-là :

  • si tu as moins de 18 ans,
  • pendant la grossesse et l’allaitement et quand tu cherches à concevoir,
  • pour les personnes atteintes de TCA ou qui ont des antécédents de TCA,
  • si tu as des règles très irrégulières ou une aménorrhée,
  • si tu as des problèmes liés à la thyroïde ou aux surrénales,
  • si tu es en situation de stress ou de fatigue chronique,
  • si tu as tendance à l’insomnie ou tu manques de sommeil de manière chronique,
  • pour les personnes diabétiques,
  • pendant un cancer.

La meilleure façon de soutenir la santé et les hormones est généralement de manger de manière régulière des repas complets, ce qui aide à réduire le stress sur le corps et à réguler la glycémie.

 

 

Comment obtenir les bénéfices du jeûne intermittent

Déjà, si jamais tu es en forme, que tu as un bon sommeil, des cycles menstruels réguliers, pas de stress chronique, etc, et que tu as envie de pratiquer le JI comme tu le souhaites, alors pas de souci. Comme dit plus haut, le fait que le jeûne soit un stress pour le corps n’est pas forcément quelque chose de négatif tant qu’il n’y a pas trop d’autres stresseurs par ailleurs.

Ensuite, dans cet article, tu remarqueras peut-être que j’ai beaucoup mentionné le fait de sauter le petit-déjeuner. Mais alors quid du dîner ? C’est là que ça devient plus intéressant ! Certaines études plus récentes sur le jeûne intermittent ont posé la question de si le moment de la journée changeait quelque chose. Et oui, il semblerait bien que ce soit le cas ! En effet, lorsque c’est le dîner qui est sauté et non le petit-déjeuner, l’élévation du cortisol est moindre et les effets négatifs sont par conséquent moins présents.

Or, il existe un trouble pour lequel le jeûne intermittent semble avoir un intérêt : le SOPK. Une étude assez récente sur 18 femmes atteintes de SOPK a montré après 6 semaines de JI une réduction de la testostérone, de l’inflammation et de la résistance à l’insuline. Si le SOPK te concerne, que tu n’as pas les contre-indications citées ci-dessus et que tu as envie d’essayer le JI, alors sauter le dîner peut être une option.

Une autre possibilité pour bénéficier des bienfaits du JI sans que cela ne soit un stress pour le corps est de manger en respectant les rythmes circadiens. Cela consiste à manger entre en gros 7h du matin et 7h du soir, ce qui fait 12h de jeûne sans avoir besoin de se retreindre. En cas de problème de glycémie, cela peut être une bonne idée, en commençant idéalement toujours par un petit-déjeuner complet dans l’heure qui suit le réveil.

 

 

3 lecteurices ont aimé cet article, merci à vous 🙂

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